La réduction des risques concerne les lois, les programmes et les pratiques qui visent à réduire les méfaits associés à l’utilisation de drogues psychoactives, par des personnes qui sont incapables ou qui n’ont pas la volonté de cesser de consommer[1]. Deux caractéristiques définissent principalement cette approche :
- Elle se concentre sur la prévention des risques et sur les personnes elles-mêmes, plutôt que sur la prévention de la consommation de drogues
- Elle reconnait les usagers comme des sujets responsables et citoyens, capables de faire des choix et donc, pour peu qu’on leur en donne les moyens, de se protéger et de protéger autrui[2].
Au-delà de leur pertinence en termes de santé publique, les programmes de réduction des risques ont pour objectif de contribuer au développement d’une réponse communautaire. C’est-à-dire qu’ils visent le renforcement des capacités et l’autonomisation par la participation active des groupes bénéficiaires, à la fois pour définir les réponses de santé et pour lutter contre la stigmatisation et l’exclusion dont ils sont l’objet[3].
Exemples d’application en matière d’IP
- La RdR participe pleinement et entièrement à la promotion d’un environnement favorable
- Dans une logique transversale, éduquer l’ensemble de la population à la réduction des risques doit être compris comme une nécessité. Les risques doivent être réduits tout au long du continuum des usages allant de la consommation à faible risque jusqu’à la dépendance.
- La RdR peut être comprise comme une première intervention (pertinente et précoce) de la part de la personne concernée
- Avec le travail d’outreach (le « aller vers » du travail de rue), la RdR a démontré que les professionnels n’étaient pas condamnés à attendre la venue des personnes concernées dans leurs murs mais qu’ils pouvaient aller à leur rencontre là où elle se trouvaient.
Enjeux
- La RDR a donné lieux à des pratiques innovantes comme le travail avec les pairs ou l’auto-support[4] qui questionnent la position « omnisciente » des professionnels
- La RdR a profondément fait évoluer les définitions du soin, longtemps conçu comme un trajet unique vers l’abstinence ou d’une prévention imposant des normes de santé et luttant contre telle ou telle drogue. Elle a donné de nouvelles pratiques et suscité de nouvelles approches : l’intervention précoce (stratégie qui associe l’adaptation des services pour faciliter la rencontre d’usagers dégagés d’un statut de malade ou de délinquant) et la capacité à « aller vers » sans attendre une hypothétique demande, par exemple[5].
- La RdR implique de ne plus vouloir éradiquer les drogues et les conduites addictives, mais au contraire de « vivre avec », et de « réduire les risques » (sociaux et médicaux) associés à ces comportements[6].
- La réduction des risques a révélé que « s’occuper de » (to care, en anglais) était suivi d’effets positifs quand « soigner » (to cure) était prématuré voire inefficace[7].
- Il apparaît clairement aujourd’hui que les problèmes d’accès aux soins s’accompagnaient presque toujours de problèmes sociaux qui doivent être pris en compte en même temps et même parfois préalablement à ceux qui touchent au volet sanitaire. La question des droits sociaux est devenue presque partout une question inhérente au travail de Réduction des risques[8].
- Les progrès rendus possibles depuis vingt ans par la RdR résultent d’un double abandon : celui de l’abstinence comme seul modèle des pratiques de soin et de prévention, et celui d’une éradication des drogues comme condition du « vivre ensemble ». Elle repose sur un nouvel équilibre entre plaisir, risque et souffrance. Son expérience se fonde sur l’accueil inconditionnel : « là où ils sont, là où ils en sont »[9].
[1] IHRA, *Qu’est-Ce Que La Réduction Des Risques et Méfaits ? (Londres: International Harm Reduction Association, April 2010), p. 2
[2] Alain Morel and Jean-Pierre Couteron, Les conduites addictives (Paris: Dunod, 2008), p. 145.
[3] MdM, ‘La Réduction Des Risques’, Médecins Du Monde
[4] FA, Réduire Les Risques – Éthique, Posture et Pratiques, Pratique(s (Paris: Fédération Addiction, 2017), p. 78
[5] Jean-Pierre Couteron, ‘Société et addiction’, Le sociographe, 39.3 (2012), 10–16.
[6] Fédération Addiction, ‘Actal N° 13 : Réduction Des Risques: Le Nouveau Paradigme Des Addictions ?’, 2013, p. 3
[7] Jean-Pierre Couteron and others, ‘Intervention Précoce à Partir Des « consultations Jeunes Consommateurs »’, Actualité et Dossier En Santé Publique, n° 60 (2007), 54–56.
[8] ERIT, Charte Européenne Pour La Réduction Des Risques (Fédération Européenne des Intervenants en Toxicomanie, 2001), p. 24 (p. 14).
[9] Fédération Addiction, ‘Actal N° 13 : Réduction Des Risques: Le Nouveau Paradigme Des Addictions ?’, p. 2.
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